
Robert Badinter, l’ancien ministre de la Justice de François Mitterrand qui a porté l’abolition de la peine de mort en France, est décédé dans la nuit de jeudi à vendredi, a-t-on appris auprès de sa collaboratrice, Aude Napoli. L’ancien président du Conseil constitutionnel était âgé de 95 ans.
« La peine de mort, cela veut dire que l’État s’arroge le droit de disposer de la vie du citoyen, cela implique secrètement le pouvoir de vie et de mort de l’État sur le citoyen. Et ça je le refuse. » En 1976, alors avocat engagé, Robert Badinter faisait déjà montre d’une conviction inaltérable, ancrée dans une histoire familiale hantée par la Shoah.
Il grandit dans une famille juive originaire de Bessarabie – région située entre la Roumanie et l’Ukraine, sur le territoire de l’actuelle Moldavie. Sa grand-mère maternelle, à qui il consacrera un livre, fuit à l’ouest au XIXe siècle les pogroms et l’antisémitisme du régime tsariste. Son père, Simon, émigre en France après la révolution bolchévique. Il est naturalisé français en 1928, l’année de naissance de Robert.
La famille Badinter vit alors à Paris où le père tient un magasin de fourrure. Pendant l’Occupation, ils se réfugient en zone libre à Lyon. Les Allemands finissent pas occuper la ville en 1942 et quelques mois plus tard Simon Badinter est arrêté lors d’une rafle de la Gestapo sur ordre de Klaus Barbie. Parti à sa recherche, Robert manque à son tour d’être arrêté. Déporté dans un camp de concentration en Pologne, Simon Badinter y meurt en 1943. Robert Badinter a alors 15 ans.
Après la guerre, il étudie le droit, les lettres et la sociologie, et à 22 ans, il est admis au barreau. Durant sa carrière d’avocat, il défendra aussi bien Coco Channel que des accusés de droit commun.
L’artisan de l’abolition de la peine de mort :

Après l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981, le ministre de la justice, Robert Badinter, porte le projet de loi d’abolition de la peine de mort, mettant ainsi en œuvre une promesse de campagne du président François Mitterrand fraîchement élu.
Le 17 septembre 1981, dans un discours enflammé de plus de deux heures tenu devant l’Assemblée nationale, il déclare : « J’ai l’honneur, au nom du gouvernement de la République, de demander à l’Assemblée nationale l’abolition de la peine de mort en France… ». Puis il ajoute : « Demain, grâce à vous, la justice française ne sera plus une justice qui tue (…). Demain, vous voterez l’abolition de la peine de mort. »
Le projet de loi est adopté le lendemain par les députés, et le 30 septembre par les sénateurs. La loi « portant abolition de la peine de mort » est promulguée le 9 octobre 1981.
Le discours de Robert Badinter pour l’abolition de la peine de mort en 1981 … ICI !